Ce nom apparaît en 1231 sous la forme Mons Lugdunus (cité par M. T. Morlet), ce qui lui donnerait une origine semblable à celle de Lyon. Lugdunum : le mont ou la forteresse de Lug, qui est une ancienne divinité solaire Gauloise selon la version la plus couramment admise. C’est le hameau de Montlahuc, voisin de Bellegarde, dans la Drôme, qui semble être ce Mons Lugdunum.
On trouve des Montlahuc établis à Verclause vers 1649, puis à Lemps où un François né en 1715 était châtelain, enfin à Rosans vers 1770. Trois frères issus de la branche rosanaise de cette famille s’illustrèrent, plus ou moins bien, pendant les guerres de l’Empire.
François Montlahuc, le frère aîné, était né à Rosans le 27 février 1775. Il avait quatre frères et quatre sœurs, issus de François, notaire à Rosans, puis receveur de l’Enregistrement à Serres.
Nommé le 11 septembre 1793 lieutenant au cinquième Bataillon des Hautes-Alpes, il assista au siège de Toulon et fit les campagnes d’Italie des années 2 et 3 (1794 et 1795). Choisi le 27 fructidor an 3 (13 septembre 1795) comme commissaire des guerres, il occupa ces fonctions dans les avant-postes de l’Armée d’Italie, puis dans la huitième Division Militaire, en particulier à Toulon, en l’an 7, et à Draguignan, « avec autant de zèle que d’exactitude ». Cette fonction venant d’être réglementée par l’arrêté des Consuls du 21 août 1800 (un seul commissaire par département) il fut donc démissionné d’office et sa démission signifiée le 12 frimaire an 9 (3 décembre 1800). Comme il n’avait jamais été légalement nommé, sa demande de réintégration, malgré plusieurs réclamations, lui fut refusée le 18 frimaire de la même année. Il ne fut jamais assigné à d’autres fonctions, et ne semble pas avoir bénéficié d’un traitement de réforme. Il eut pour seule ressource de revenir à Rosans où il s’établit comme notaire. Élu maire de Rosans en 1873, c‘est sous son mandat en 1806 que fut édifiée la fontaine de la place, connue sous le nom de Ladoucette, à qui elle fut dédicacée. Son mandat se termina en 1812, il est mort à Rosans, le 23 juin 1849.
Un second frère, Jacques Florent Montlahuc, né le 28 juin 1780, a vécu une vie pleine d’aventures. Cinquième enfant de François, il fut d’abord secrétaire d’un ses frères, François, qui était Commissaire des guerres à l’armée d’Italie. Il devait le suivre en Égypte quand survint la défaite d’Aboukir, qui devait sonner le glas de cette expédition.
Entré dans la marine en Vendémiaire an 7 (septembre 1798), il fit ses classes de matelot puis, élève officier, son noviciat sur l’aviso de guerre “La Dorade”. Arrivé en l’an 9 (1790) en Égypte, peu après l’assassinat du général Kléber, il subit pendant près d’un an le siège d’Alexandrie. Il fut rapatrié en France, après la capitulation du général Menou, sur un “parlementaire” anglais en même temps que l’Institut d’Égypte, MM. Fourrier, Rivet, etc. qui animèrent la traversée par des expériences scientifiques. Revenu à Toulon en l’an 10 il subit son examen de première classe, puis repartit pour St-Domingue. Peu après, le vice-amiral de Latouche-Tréville lui donna le commandement d’un brick de 16 canons. Ce navire fut désarmé et il revint sur le Dugay-Trouin, sur lequel il participa ensuite à toutes les batailles contre les Anglais. Son escadre fut bloquée 2 ans à La Corogne, puis 1 an au Ferrol, par le blocus Anglais. Elle sortit sur les ordres de Napoléon, ignare en matière maritime, combattit contre Nelson, à Trafalgar le 21 octobre 1805. Ce fut le désastre bien connu : quatre bateaux, seulement, dont le sien, réussirent à s’échapper. Finalement, rencontrant une autre flotte anglaise près du cap Finistère, le Dugay-Trouin fut pris après 14 heures de combat le 5 novembre : « n’ayant plus que 40 hommes qui puissent remuer de 800 qu’il avait ». « Un de leurs vaisseaux nous prit à la remorque et on nous mena chez ces insolents bretons à Plymouth ».
Le Dugay-Trouin fut aussitôt affecté par les Anglais pour combattre dans la Baltique et en Méditerranée sous le nom de l’Implacable. Il fut ensuite converti en navire-école pour les jeunes marins anglais. Il fut ensuite entreposé à Portsmouth, non loin de son vieil adversaire le Victory, navire de l’Amiral Nelson. Après 144 ans passés sous ses couleurs, la Royal Navy décida de le couler au large de l’île de Wight. Bien qu’il fut usé par l’âge et endommagé par les bombardements de la seconde guerre mondiale, il résista encore aux charges d’explosifs qu’il fallut doubler pour en venir à bout !
Retenu six ans dans le Devonshire, puis dans une prison de terre où l’on mit tous les officiers de la marine, il passa enfin deux ans dans le Pays de Galles. En 1814 après neuf ans de captivité, il était de retour en France à Rosans, pour se retrouver déshérité, un de ses frères, François, notaire, avait profité de la vieillesse de leur père pour l’influencer et faire main basse sur les biens qui auraient dû lui revenir. Il épousa ensuite le 6 novembre 1816 Adélaïde Royer des Champs, originaire de Claix (38), puis resta dans la maison paternelle jusqu’à la mort de son frère, survenue en 1826. Il rejoignit alors à Alger le commandant Gallois, son ancien camarade, « qui parvint à le placer dans les huiles où je végète encore » (Document écrit à Alger le 19 octobre 1834, publié par Christian Montlahuc, descendant direct de Jacques Florent).
Un troisième frère, Aimé Michel Jean Montlahuc, né à Rosans le 13 septembre 1785, se consacra à la vie militaire pendant 33 ans. Entré dans la Garde le 20 mars 1805, il fut successivement sous-lieutenant au dixième régiment d’infanterie de ligne en 1807, lieutenant en 1809, capitaine le 8 février 1813. Il fit toutes les campagnes de la Grande Armée en 1806, 1807 et 1808. Affecté à l’armée du Rhin en 1809, à l’armée d’Allemagne en 1810, il fit la campagne d’Espagne de 1811, 1812 et 1813, puis à la Grande Armée de France en 1814. Blessé deux fois, le 5 juillet 1809 d’un coup de feu au bras droit, puis le 3 septembre 1812 à Pampelune d’un coup de balle à l’épaule droite, il fut fait chevalier de la légion d’honneur le 25 septembre 1813. Mis en non-activité le 9 juillet 1815 et licencié le 8 septembre, il fut placé provisoirement le 16 mars 1816 dans le cadre de la Légion départementale des Hautes-Alpes, qui venait d’être organisée. À cette occasion le colonel de Capdeville, chef de cette légion, écrit : « célibataire, physique assez bon, il m’a paru un bon officier … Il mérite une place de capitaine pour son dévouement et son attachement à la famille des Bourbons ». Promu chef de Bataillon à l’ancienneté le 11 août 1831, il avait été désigné, à l’inspection de 1832, comme un bon Chef de Bataillon. Aux inspections suivantes à partir de 1833, il fut noté « officier médiocre, n’ayant ni les moyens, ni l’instruction nécessaire à son emploi » ; en 1838 : « bonne conduite, bons principes, belle tenue, … il sait sa théorie, mais ne la raisonne pas … Souvent trop de familiarité … est au-dessous de sa position » . Le mot de la fin appartient au général Durocheres : « officier supérieur très médiocre, manque d’intelligence, et commande mal son bataillon ». Aimé Montlahuc fut admis d’office le 17 septembre 1838 à faire valoir ses droits à la retraite, à titre d’ancienneté, et en qualité de Chef de Bataillon. Il avait 33 ans 8 mois 14 jours de service effectif, soit avec ses 14 ans de campagne, 47 ans 8 mois 14 jours de services totaux. L’ordonnance du 18 janvier 1839 lui accorda une pension annuelle de 1 950 francs.
François Hypolite Montlahuc, fils de François, vu plus haut, fut maire de 1865 à 1868, année où il est décédé à Veynes. Il avait négligé ou omis de signer les premiers actes de 1868 : un arrêté du 20/04/1869 confia la régularisation au nouveau Maire Truphémus.
Louis Hypolite Montlahuc, fils du précédent, né à Rosans le 28 août 1845, fut maire de Rosans de 1871 à 1876. Louis, marié à Eugénie Millet en 1907, décédé au Perreux (Seine) en 1914, était qualifié de « rentier » lors du mariage de sa sœur Mathilde en 1869. En fait il devait être notaire comme son père, car un contrat de mariage établi en 1874 porte sa signature. On ne sait pas à quelle date il s’établit à Paris, mais c’est certainement après 1876. C’est lui qui écrivit, en 1896, « le vrai chemin d’Annibal à travers les Alpes », récit dans lequel il précise « natif des Alpes, pendant 20 ans je les ai habitées, après ma sortie du collège ». Son récit adapté figure sur ce site internet.